Après vous avoir abreuvé de drames
sanglants et de désertions qui finissent dans les pleurs, nous nous
sentons maintenant d'humeur plutôt badine. Ce n'est pas encore le
retour du printemps qui nous rend guillerets mais le besoin
d'échapper à la grisaille ambiante. Comme la semaine dernière
voici donc une chanson légère. Légère comme le jupon de cette
jeune fille avec lequel joue le vent. Encore une fois c'est le double
sens qui domine dans cette chanson. Nous resterons donc
volontairement « légers » sur les commentaires cette
semaine.
Pour écouter la chanson et lire la
suite :
Nos archives sonores possèdent de
nombreux exemples de cette chanson collectés aux quatre coins du
département de Loire-Atlantique : d'Ancenis au Pays de Retz et
de Chateaubriant au pays Mitaud. Elle est aussi très connue chez les
voisins morbihanais ou vendéens, ainsi que dans d'autres régions et
particulièrement au Canada.
La version que nous vous présentons
vient d'Herbignac. Notée en 1976, elle figure aussi dans le tome 2
des collectes rassemblées par Hervé Dréan sous le titre « Instants
de mémoire » (toujours disponible sur son site).
C'est une symphonie en blanc que nous
présente cette chanson. Tout y est dans le ton, des pétales de
roses (1) aux accessoires vestimentaires de la jeune fille :
jupon, jarretière, ruban, bas ou pantalon...selon les variantes,
avec juste quelques nuances de rose.
Dans les chansons traditionnelles, les
roses blanches sont à la fois le symbole de l'amour et celui de la
pureté des sentiments. C'était bien avant que la chanson populaire
ne fasse des « roses blanches » un épouvantable un mélo.
Cette blancheur virginale contraste tout de même avec les sous
entendus qui parsèment ces quelques lignes. D'abord le vent qui se
charge de réaliser les souhaits des voyeurs que nous sommes. Puis ce
défilé de mode énumérant les pièces de textile qui cachent ce
qu'on souhaite dévoiler. Enfin la fausse pudeur qui feint de
désigner ce à quoi on pense tout en s'offusquant qu'on ait pu y
penser. A ce sujet, bien des versions ajoutent un commentaire, absent
de celle ci. Le plus courant étant :
De ce que je veux dire: la boucle de
son ruban
Malheur à vous, messieurs, qui
pensiez autrement
La toute jeune héroïne involontaire
de l'histoire est ici restée dans l'anonymat. D'elle on apprend
parfois qu'elle est « la fille du président » ou une
«jeune fille au retour du couvent ». Elle est carrément
nommée dans une version vendéenne : « la belle Hélène,
une fille de Challans ».
Le refrain son voile qui volait
est donc connu dans tout l'Ouest de la France et aussi très
populaire au Canada. Le même texte est parfois associé à un
refrain différent du genre :
Dansez jeunes bergères
Sautez légèrement
Le thème est sans doute fort ancien,
puisque déjà imprimé au 17ème siècle. Il a su résister au temps
en raison de son caractère grivois. Ce qui ne l'a pas empêché
d'être endisqué (2) à plusieurs reprises au Canada (Ovila Légaré,
Pierre Daignault, Edith Butler...) et en France par Marie Dubas en
1932 et les Charlots dans les années 80 !
Changeons de thème. Dans huit jours
c'est Noël. Nous n'avons pas mis en ligne de chanson spécifique,
mais si vous voulez en retrouver sur ce sujet, toutes notées en
Loire-Atlantique, voici la liste de celles déjà publiées sur ce
blog :
N° 29 – le Noël des oiseaux
(novembre 2013)
N° 145 – D'où viens tu bergère ?
(mars 2016)
N° 158 – la fuite en Egypte (juin
2016)
notes
1 – ou le laurier blanc dans
certaines versions. Des légendes prétendent que les roses étaient
blanches à l'origine ; leur coloration serait due au sang !
2 - enregistré sur disque. Le terme
est utilisé par les québécois, mais on peut leur faire confiance pour
ce qui est de faire évoluer le français.
interprètes : Daniel Lehuédé
avec Jean Auffray et Jean-Louis Auneau
source : Anna Lanio et
Pierre-Marie Pédron, d' Herbignac (Loire-Atlantique) collectage :
Hervé Dréan, Kloé Chatal et Yannick Robert en février 1976
catalogue P. Coirault : La
jarretière de la fille du président (Amourettes - N° 01826)
catalogue C. Laforte : Son
voile qui volait (I, O-02)
Son voile qui volait
C’était une jeune fille qui n’avait
pas quinze ans
Qui n’avait pas quinze ans (bis)
Elle s’était endormie au pied d’un
rosier blanc
refrain
Son voile par ci, son voile par là
Son voile qui volait, qui volait
Son voile qui volait au vent
Elle s’était endormie au pied d’un
rosier blanc
Au pied d’un rosier blanc (bis)
Le vent souleva sa robe, souleva son
jupon blanc
… Ses belles jarretières roses et
son pantalon blanc
… Et autre chose aussi de bien plus
séduisant
… Heureux, heureux celui qui sera son
amant
… Il aura le plaisir de lui prendre
souvent.
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