vendredi 5 décembre 2014

83 - On est lié

C'est encore à Gustave Clétiez (1) via le recueil de Fernand Guériff (2) que nous devons cette chanson. Cette version guérandaise a des cousines un peu partout en France. Elle contient deux avertissements chantés. Le premier pour dire que les anges d'avant le mariage peuvent se transformer en diables déchaînés. Le second pour rappeler que le mariage est un engagement à vie. On est si bien lié qu'on ne saurait se délier.
Avant de s'attarder sur la morale de cette histoire, Guériff nous précise que la mélodie utilisée est assez courante dans tout l'ouest. Pas seulement pour cette chanson type, mais également avec d'autres paroles.
écouter la chanson et lire la suite


La cérémonie du mariage, bien avant d'être une formalité administrative ou un sacrement religieux, est avant tout un acte public. Elle est destinée à porter à la connaissance de tous la concrétisation d'une union, à en faire la « publicité », au sens de « rendre public ». Les paroles de la chanson sous toutes ses versions sont très explicites à ce sujet : Si la mariée regrette son jeune temps et souhaiterais n'être pas mariée, on lui rappelle qu'il n'est pas question de revenir en arrière « quand le grand oui est prononcé ». « Cela ne peut pas être quand le curé y a passé...aussi le maire, les parents qui ont signé » (version du Berry) «  devant Dieu devant les hommes, devant toute la société » (marais vendéen). D'où le refrain insistant sur le thème du lien que seul la mort déliera. Un seul texte pourtant identique, noté dans l'Indre (3), échappe à ce refrain pour le remplacer par « faut-il que pour un mari tout plaisir soit aboli ».
Reste aux mariés à « s'arranger ou s'tricoter (se disputer) selon la formule qui conclut la version notée par L. Radioyes à saint Martin sur Oust.
Si les maris sont des diables déchaînés, ils sont parfois définis comme des « lions déchainés »(4). La chanson étant de toute évidence bien antérieure à l'invention du documentaire animalier, la réputation du lion est donc assurée depuis fort longtemps. Le roi des animaux n'est, il est vrai, pas un modèle de bon père de famille laissant tout le travail de la chasse aux lionnes et ne se manifestant que pour réclamer la part du lion et ...s'accoupler, domaine où il excelle, parait-il.


notes
1 – voir la chanson de la semaine précédente
2 – Fernand Guériff (tome 2 – le folklore du mariage) – n'attendez pas qu'on ait tout enregistré pour vous procurer cet ouvrage indispensable ; rendez vous à la rubrique « nos éditions »
3 - Barbillat et Touraine – chansons populaires dans le bas Berry - T. 5, page 167, collectée à Argenton sur Creuse
4 - versions collectées dans l'est (Lorraine, Ardennes) en particulier, mais aussi dans le Morbihan.

Chanson pour danser le bal rond – publiée dans le Folklore du mariage p. 178 – Tome 2 de l'oeuvre de Fernand Guériff, publié par Dastum 44 et le parc régional de Brière
Collection Gustave Clétiez, Guérande vers 1860
interprètes : Françoise Bourse et Annick Mousset
catalogues : Coirault n° 4907 – les maris sont des diables déchainés - Laforte 1 K 16

On est lié

“Entre nous mes jeunes filles - qui voulez vous marier -
Prenez garde à ce passage - On y est souvent trompé.
On est li-é, si bien li-é
Qu’on ne saurait se déli-er.

Car ces messieurs sont fort sages - quand ils sont à marier,
Mais quand ils sont en ménage - sont des diables déchaînés -
On voit les dames aux fenêtres - regrettant le temps passé -
Disant : j’voudrais encor être - encor fille à marier -
N’est plus temps, la chose est faite - le grand oui est prononcé”.


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