vendredi 14 novembre 2014

80 - Gueule de serpent

Nous vous invitons à prolonger notre séjour sur l'Erdre par une petite croisière festive. Henri IV l'avait qualifié de plus belle rivière de France. Pour un cours d'eau aussi modeste le nombre de chansons qu'il a inspirées est remarquable. Laissons de coté les meurtres, les noyades et les infanticides pour voir le bon coté des choses. Nous avons déjà chanté les plaisirs du bord de l'eau, à la Jonelière (1). Cette fois nous embarquerons pour remonter sa partie navigable.
On l'aime tellement cette bonne rivière de l'Erdre qu'on lui a consacré un ciné concert, déjà projeté à trois reprises et que vous aurez encore la chance de voir ou revoir bientôt (2). Des chansons interprétées en direct sur des images sélectionnées parmi les archives de la cinémathèque de Bretagne ; c'est un spectacle qui vaut le détour.
Mais revenons à notre chanson de la semaine...
lire la suite et écouter la chanson


...qui a quand même un rapport avec la complainte précédente puisque le personnage connu sous le nom de « Gueule de serpent » n'est autre que le pêcheur Vié ; celui qui avait découvert le corps sans vie de Constance (3). Louis Vié, meunier au moulin de Gaschet, pêcheur et restaurateur était ce qu'on appelle une figure locale. Il a vécu de 1826 à 1916.
Cette chanson, comme la précédente, est donc un héritage de la fin du 19ème siècle. Elle a été publiée en 1880 dans des recueils de chansons de plaisanciers. Ces gens aimaient autant la vie sur l'eau que la bonne chère à terre. Voilà pourquoi le texte nous entraîne de guinguette en auberge tout au long de la remontée de la rivière entre Nantes et Nort sur Erdre.
Si le voyage se faisait encore à la voile, avec démâtage obligatoire pour passer sous le pont de Sucé, il y est quand même question de navigation à vapeur. Le Pyroscaphe fut le nom du premier bateau à vapeur construit en France. Au 19ème ce terme était probablement utilisé comme générique pour bien des bateaux à vapeur (4). L'Erdre est à cet endroit la première portion de la liaison Nantes – Brest par le canal et la plaisance devait y côtoyer des péniches poussées par des « pyroscaphes », en l'absence de chemin de halage.

Contrairement à la plupart des chansons de ce blog, celle ci n'est pas inédite. Elle a déjà été endisquée (5) sur les productions suivantes :
  • les Chantous du pays nantais – cassette produite par le cercle breton de Nantes en 1983
  • Chants de mariniers, volume 5 de l'anthologie des chansons de mer du Chasse-marée ; 33 tours enregistré en 1985 – mené par Gilbert Bourdin
  • Chants de marins nantais – toujours des éditions du Chasse marée, mais en CD cette fois ; chanté par Denis Le Vraux, du groupe Ellébore (1991)
  • la Godinette : le canal de Nantes à Brest (2002)

notes
1 – la chanson de la Jonelière – n° 32 - août 2013
2 – le 1er mars 2015 au château de Nantes, puis le 18 septembre 2015 à Sucé sur Erdre dans le cadre des journées du patrimoine
3 – chanson n° 79 de novembre 2014, pour ceux qui ont la mémoire courte.
4 – comme « frigidaire » pour les réfrigérateurs, ou « micheline » pour les autorails
5 – ce verbe est bien français...du Québec.

Auteur supposé : M. Viaud, responsable du cercle vélique de Nantes à la fin du 19ème siècle.
Sources écrites : le livre d'or de bord des canotiers de l'Erdre et le recueil des chansons des régates nantaises
chanson enregistrée en 1982 par Raphaël Garcia auprès de M. Cannonet
interprètes : chanteurs de Dastum 44 menés par Daniel Le Huédé

Gueule de serpent

Pour aller à Nort nous partons,
Adieu ! filles de Nantes ; (bis)
Mais dans deux jours nous reviendrons
Vous revoir mes charmantes (bis)
Avant qu'on appareille
Vidons une bouteille.

Refrain :
Puis hiss' la toil' et foutons l' camp
Pour aller voir Gueul' de Serpent
Hiss' la toil' et foutons l' camp
Pour aller voir Gueul' de Serpent

Quand sans mouiller, nous passerons
Devant La Jonelière (bis)
À la santé de Beaufreton
Nous lèverons nos verres (bis
Le Muscadet qui brille,
Nous fait aimer les filles.

Nous n'arrêtons pas à Gaschet
L'équip' en est morose (bis)
Vié ne venez pas nous chercher
Adieu ! la tante Rose (bis)
Le cidre qui pétille
Nous fait aimer les filles.

Arrivés au port de Sucé
Nous démâtons dare dare (bis)
Pauvr's équipiers faut se passer
D'anguille à la tartare (bis)
Le beurre blanc et l'anguille
Nous font aimer les filles.

Nous traversons le cap au nord
Les plain's de Mazerolles (bis)
Pendant que la cuisine à bord
Chante dans la cass'role (bis
Le beurre qui grésille
Nous fait aimer les filles.

Par vent debout à Port‐Mulon
On envie l' pyroscaphe (bis)
Car pour aller à Nort c'est long
Quand on pouss' à la gaffe (bis)
La gaff' et la godille
Nous font r'gretter les filles.

Pour aller à Nort nous partons,
Adieu ! filles de Nantes ; (bis)
Mais dans deux jours nous reviendrons
Vous revoir mes charmantes
Avant qu'on appareille

Vidons une bouteille.

1 commentaire:

  1. chanson découverte lors d'une visite du musée de l'erdre : sympa !

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