Il la battait ; elle le quitte !
Voilà, tout est dit. Pas besoin de s'étendre sur le sujet. Merci et
à la semaine prochaine.
Non, mais avouez que pour une fois tout
commentaire semble superflu. Il y a quelques semaines (c'était en
mai) on envisageait toutes les difficultés d'aboutir au mariage. La
lune de miel a été courte. On est fin août et c'est déjà la
saison des regrets.
En plus cette chanson est totalement
dépourvue d'originalité. Elle est quasi universelle, présente
dans le folklore de toutes les régions.
Bon, puisque vous insistez, intéressons
nous à certains détails. Pour commencer, la maille (1)
écouter la chanson et lire la suite
était une
petite monnaie du genre de ces pièces jaunes qu'on n'utilise guère
qu'à la boulangerie. Celles qu'une femme d'ancien président ramasse
pour ses bonnes œuvres. La maille valait la moitié d'un denier.
D'où l'expression avoir ni maille ni denier, synonyme d'être
fauché. On voit donc bien que cette chanson ne date pas d'hier et
que son thème a traversé les siècles sans prendre une ride. Le
texte noté par Ballard en 1724 est globalement le même, la jeune
fille déçue y va parler d'amour sur la fougère avec de jeunes
officiers.
Ici, la maumariée s'en va apprendre
aux filles à danser. Assez souvent c'est pour apprendre elle même
qu'elle quitte son vieux mari ; pour apprendre à danser avec de
jeunes gens. Bon nombre de versions de cette chanson contiennent
l'expression « ils m'apprendront, je leur apprendrai »...à
jouer aux cartes, aux dés et pour finir, au jeu des dames ou des
filles. Ce « jeu d'aimer » est l'aboutissement de la
révolte, exprimé ouvertement ou en simple filigrane. Et si parfois
elle se retrouve avec des moines, des abbés, des curés c'est pour
des raisons alimentaires : ils ont du lard dans leur charnier
(2).
Notez la petite particularité de la
version collectée par Soreau : le vers final est tout près de
nous entraîner dans la chanson du cordonnier qui répare les
souliers des filles qui ont trop dansé. Louisette Radioyes en a
collecté une version plus complète à Saint Congard (3) qui se
termine ainsi :
J'ai tant chanté, j'ai tant dansé
Que mes souliers en sont percés
C'est le profit du cordonnier
C'est le profit du mailletier (4)
C'est le profit de tout les métiers
Etonnant non ?
Notes
1 - Petite monnaie de cuivre qui n'est
plus en usage, mais qui valait la moitié d'un denier, et était de
la sorte synonyme d'obole (dictionnaire Littré)
2 – si tant est que cette expression
n'ait pas un double sens caché !
3 – traditions et chansons de haute
Bretagne – le répertoire de Saint Congard et ses environs –
Edisud, 1995.
4 – fabricant de maillettes, clous à
grosse tête plate dont on garnissait le dessous des sabots de bois.
Définition donnée dans l'ouvrage de L. Radioyes
Mon
père, hélas, m’a mariée
Mon père hélas m’a mariée, faut
chanter (bis)
Un vieux bonhomme il m’a donné,
hélas, hélas et toujours hélas
En chantant, maluron lurette
Gai, gai, gai, jolies amourettes
Faut chanter, maluron luré
Un vieux bonhomme il m’a donné, faut
chanter (bis)
Qui n’a ni maille ni deniers, hélas,
hélas et toujours hélas
En chantant, maluron lurette
Gai, gai, gai, jolies amourettes
Faut chanter, maluron luré
Qui n’a ni maille…
Qu’un gros bâton de vert pommier…
… Avec quoi qu’i m’moud les
côtés…
… S’il m’y bat ‘core je m’en
irai…
… Je m’en irai sur les verts prés…
… J’apprendrai aux filles à
danser…
… Elles m’apprendront, j’leur
z’apprendrai…
… Ce s’ra l’profit du cordonnier…
collectage : Abel Soreau
source : Joséphine Roué,
Guémené-Penfao, 1904
interprète : Janick
Péniguel – réponses : Anne-Gaëlle Normand et Fabienne Mabon
catalogue
Coirault : Le vieillard au bâton de vert pommier
(maumariées – N° 05716)
catalogue
Laforte. : La mariée battue (I, D-27)
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